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DANS CHAQUE ENFANT IL Y A UN DON

Dernière mise à jour : 27 juin

« Chaque bébé recèle un don. À la fin de votre vie, vous devriez vous demander : « Qu'en ai-je fait ? » Les mères ont un rôle important à jouer pour éveiller ce potentiel latent. Le travail de La Maison Rose vise à contribuer à manifester ce don en chaque femme et chaque fille qui y séjourne. »

À mon arrivée à Dakar en 2013, je proposais des cours de yoga en parallèle de mon travail, principalement à des expatriés. J'aimais ça, mais en même temps, un sentiment grandissait en moi : je voulais partager le yoga plus largement, avec des personnes qui n'en avaient peut-être jamais entendu parler ou qui n'avaient pas les moyens de s'offrir un cours régulier.


Je me suis donc mise à la recherche d'une organisation dont j'avais entendu parler par le bouche-à-oreille : La Maison Rose , située à Guédiawaye, l'un des quartiers les plus pauvres de la banlieue de Dakar. Sa fondatrice, Mona Chasserio, est une Française d'une soixantaine d'années, remarquable par sa résilience et sa conviction profonde pour son travail de toujours : elle a passé vingt ans à vivre et à accompagner les femmes dans les rues de Paris, dont plusieurs années à vivre elle-même dans les rues. Pour Mona, cependant, ce n'est pas tant un travail qu'une vocation. Elle a vécu sa propre transformation personnelle en 1988, un « éveil » qui a façonné son parcours de vie depuis.

 

Il y a six ans, dans le cadre de sa « retraite », Mona a créé le seul foyer pour femmes et jeunes filles vulnérables au Sénégal. La Maison Rose offre un espace sécurisé aux femmes victimes d'abus sexuels, de viols, de violences conjugales et d'abandon familial. Bien que la Constitution sénégalaise garantisse l'égalité des hommes et des femmes devant la loi et interdise toute discrimination, le viol est un moyen de violence répandu contre les femmes au Sénégal. Selon une étude d'ONU Femmes de 2012, 50 % des cas de violences contre les femmes signalés à la police sont des viols. Dans les hôpitaux et les tribunaux, le viol représente un tiers des violences contre les femmes enregistrées. Pourtant, de nombreux cas ne sont pas signalés et, parmi ceux qui le sont, 47 % des violeurs inculpés sont libérés sans procès. Ce que Mona et son équipe ont observé au fil des années, c'est que l'œil vigilant de la société exerce une emprise puissante : au lieu de reconnaître le traumatisme qui accompagne un viol ou une grossesse non désirée, les familles préfèrent souvent « sauver la face » (surtout lorsque le père est inconnu ou ne s'intéresse pas à l'enfant), rejetant leurs filles à un moment où elles ont le plus besoin de soutien.

 

La philosophie qui guide le travail de Mona est « Unises-vers-elles », une approche universelle et une action unie pour la transformation intérieure et extérieure des femmes et des filles placées sous son aile. Contrairement aux rares autres organisations qui soutiennent les femmes et les filles au Sénégal, La Maison Rose peut accueillir jusqu'à 30 femmes et filles, où elles peuvent rester jusqu'à leur rétablissement. L'alimentation et le logement étant assurés, l'accent est mis sur la transformation intérieure, soutenue par un accompagnement social pratique, une médiation familiale et des opportunités d'insertion professionnelle. Des ateliers quotidiens, incluant théâtre, yoga, arts plastiques et cirque, visent à éveiller l'inconscient et à confronter les femmes à elles-mêmes et à leurs émotions.

 

Séjourner à La Maison Rose permet aux femmes et aux jeunes filles de prendre le temps de réfléchir à leur vie. Avec un soutien, chaque femme est encouragée à trouver des solutions par elle-même et à ne pas avoir peur. Cependant, ce travail est loin d'être facile ; il s'agit souvent d'un long processus de transformation de la souffrance en lumière, ou, selon Mona, de renaissance :


« Je me sens comme un guerrier, car il faut lancer sa lance là où la blessure est profonde pour pouvoir transformer leur souffrance. »

La transformation de la souffrance à La Maison Rose est un exemple concret d'une célèbre histoire de la mythologie hindoue, le « Samudra Manthan », où les Dieux et les Démons barattèrent un océan de lait afin d'en extraire le nectar de l'immortalité. Cependant, ce barattage libère un poison mortel, suffisamment puissant pour détruire toute la création. Ce poison symbolise les défis qui peuvent survenir sur le chemin spirituel ou dans la vie en général. Ce n'est qu'en les affrontant et en les comprenant que nous pouvons apprendre et grandir. La Maison Rose contribue à faciliter ce barattage chez chaque femme et chaque jeune fille qui franchit ses portes.


« Chaque bébé recèle un don. À la fin de votre vie, vous devriez vous demander : « Qu'en ai-je fait ? » Les mères ont un rôle important à jouer pour éveiller ce potentiel latent. Le travail de La Maison Rose vise à contribuer à manifester ce don en chaque femme et chaque fille qui y séjourne. »

En cours, nous sommes assises en silence, nous respirons, nous rions et nous évoluons ensemble dans différentes postures. Je ne vois certaines femmes que quelques semaines, d'autres que je connais depuis deux ans. Pour certaines, les cours de yoga suscitent un intérêt sincère, pour d'autres, celui-ci se développe avec le temps, voire pas du tout. Chaque cours est différent, tout comme l'histoire de chaque femme. Il peut parfois être difficile pour Mona et son équipe de supporter ces histoires difficiles. Mais grâce à elles, elles aussi apprennent et grandissent.


Comme ils l'ont partagé avec moi :


« Il est important de faire preuve de compassion et non de pitié ; de souffrir avec quelqu’un mais pas pour lui ; et surtout d’avoir un cœur ouvert mais solide et de se voir reflété et uni à chaque personne. »

Cela fait maintenant plus de neuf ans que j'ai donné mon premier cours de yoga à La Maison Rose. Les cours hebdomadaires se poursuivent encore aujourd'hui avec le soutien de plusieurs professeurs de yoga. La Maison Rose a toujours besoin de financements supplémentaires pour soutenir son action. N'hésitez pas à donner généreusement !

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